Un jour j’entends au bout du fil « j’ai une tumeur au cerveau » et c’est un soulagement.  Enfin, nous savons ce qu’il a, après  avoir pensé à un AVC, un « bleu » de jeunesse et je ne sais plus quoi encore. On est loin, 9300km nous séparent, mais enfin, on va pouvoir le soigner et c’est tout ce qui compte.

Commencent alors les rendez-vous, à deux, toujours, tous. Tout va très vite. Nous sommes un jeune couple mais sans que rien n’ai été dit nous sommes une équipe. Il est évident que nous allons vivre cette aventure ensemble et être présent l’un pour l’autre. Elle nous a soudé, nous savons maintenant que plus rien ne peut nous mettre en péril. Et surtout nous savons pourquoi nous sommes ensemble.

Cette maladie nous a apporté de la souffrance à tous les deux, mais nous a conforté dans notre choix d’être ensemble. Je pense que c’est « une chance » que cela soit arrivé à nos débuts. Notre entourage était désolé et triste pour nous, mais j’ai expliqué que c’est mieux ainsi. Nous sommes devenus égoïstes le temps nécessaire et avons informé notre entourage que nous ne voulions aucun craquage en notre présence, ni pitié, que nous n’avions surtout pas besoin de ça pour faire front. Nous avons développé un humour qui correspondait bien à la situation et que certaines personnes ont du trouver grinçant, mais il nous a aidé à relativiser et à aller de l’avant.

Nous avons eu beaucoup de chance. Tout s’est bien passé et tout va bien maintenant.

D’ailleurs, durant tout le processus de traitement, nous n’avons jamais parlé de nos ressentis. Nos discussions étaient très pratiques (rdv, prise de comprimés etc.) mais aucunement sentimentales par rapport à la maladie. C’est seulement une fois le dernier cachet de chimio avalé que nous avons commencé à parler de cette aventure, à libérer nos angoisses et à se faire part de comment on l’avait vécu et comment on avait perçu l’autre.

Nous avons pu vivre cela comme un début et non comme une fin car les pronostics de soins et vital étaient bons.

Tout n’était pas rose, loin de là (j’ai souvent pleuré, eu besoin de moments à moi, fait des crises d’angoisses, tout cela toujours seule pour ne pas le culpabiliser) mais c’est avec du positivisme, de l’amour, de l’humour et de l’attention, en plus du traitement que nous avons pu passer cette épreuve.

Nous avons compris que tout allait bien le jour ou M. Chinot a enfin répondu à l’une de nos blagues et où il nous a reçu décontracté et souriant pour la première fois.